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mardi 25 janvier 2011

L’union et le compromis

Manifestations et liberté d’expression à l’avenue Habib Bourguiba
Le Hyde Park de Tunis

Retour des élèves à l’école
Le ton monte entre les enseignants et les parents

Des locaux de l’UGTT saccagés à Monastir, Gafsa, Béja et Sousse

L’union et le compromis

Raouf KHALSI - Comment reconstruire le paysage politique ou, plutôt, comment le construire parce que de vie politique réelle, effective, on n’en a presque jamais eu ? Il y a d’un côté l’émergence d’anciens/nouveaux courants politiques, et de l’autre la légitimation que recherchent les partis légaux quelles que soient leurs accointances. Entre les deux, il y a l’essentiel : le peuple qui s’est soulevé, qui a réalisé la première grande révolution dans le monde arabe et qui a vite compris qu’on cherchait à instrumentaliser sa révolution.


Après avoir renversé le cours (hermétique aveugle et résolu) de l’Histoire les Tunisiens s’attaquent aux symboles : le RCD en premier, parti de masse pour l’Indépendance devenu parti de cadre, parti unique avec Bourguiba, puis une machine qui broyait tout sur son passage et sans la caution duquel rien ne se fait en Tunisie : depuis la simple inscription en primaire jusqu’à une thèse de doctorat. Structure, super-structure : c’est l’Etat-Leviathan. Nous le savions tous. Le dire maintenant n’est pas vraiment un scoop.

Ce qu’il faut craindre néanmoins, c’est que ce débat, un peu trop systématique, un peu trop codé et, finalement, un peu trop hystérique sur la relation (pratiquement finie aujourd’hui) entre l’Etat provisoire et le RCD, ne soit à son tour instrumentalisé. On oublie qu’autour de l’Etat deux organisations, deux frères ennemis auront orchestré la vie politique et institutionnelle dans une logique conflictuelle, mais une logique binaire quand même. S’il est vrai que le pouvoir c’était aussi le RCD, le contre-pouvoir (c’est ?/c’était ?) aussi l’UGTT. Mais l’un et l’autre étaient en plein dans le système. Peut-être pas du même bord, mais du même côté. Dans ce genre de situations, il serait tout simplement naïf de croire que le retour à la normale (provisoire) – c’est-à-dire la remise en marche de l’économie – pourra se faire avec des discours et des manifestations. Cette soif de liberté, de démocratie, d’égalité et de justice, tout un chacun la ressent.

Il s’agit néanmoins de savoir où nous allons : ce gouvernement est-il à même de préparer l’avenir immédiat ?

Cette crise de légitimité, ces conflits de castes au sein de l’UGTT, ne préparent-ils pas le terrain à un conflit frontal avec un RCD (dont on ne sous-estime pas les milices) qui est peut être encore artificiellement maintenu en vie, mais qui n’est pas encore mort ..? Ces jeunes qui ont vibré au martyr de Bouazizi n’ont pas vécu, pour la plupart, un certain Janvier 78… Seul, sans doute, le gouvernement provisoire (avec le soutien de l’Armée) pourra faire en sorte que la Révolution ne dégénère pas en révoltes… Mais il faudra aussi que ses membres manifestent un meilleur engagement pour l’avenir. Car nous avons l’impression que le gouvernement tourne autour d’un compromis et pas vraiment autour d’une union.