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jeudi 17 mars 2011

ÉTAT DES LIEUX : LES CHIFFRES DU RACISME, DE L’ANTISÉMITISME ET DE LA XÉNOPHOBIE



Introduction
Depuis la loi de 1990, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a mandat de remettre annuellement au gouvernement un rapport sur
la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie. Forte de sa composition pluraliste, de son indépendance de fait et de l’expertise de ses membres, elle a
rempli cette mission chaque année avec sérieux et détermination. Face à des phénomènes
toujours inquiétants, complexes dans leur nature, variables dans leurs manifestations et surtout extrêmement difficiles à évaluer avec l’objectivité et le recul nécessaires, la CNCDH reste persuadée que seule une mobilisation forte de
tous permettra de faire reculer le racisme dans les esprits et dans les actes.
Le présent rapport s’inscrit dans cette démarche. Avec les limites inhérentes à un tel exercice, la CNCDH tente ici de présenter pour l’année 2009, comme elle le fait depuis près de vingt ans, un tableau des manifestations de racisme, d’antisémitisme et de xénophobie, ainsi qu’un ensemble des mesures de lutte mises en oeuvre dans diverses enceintes et à différents niveaux.
Ce tableau ne prétend pas refléter de façon exhaustive la réalité du phénomène ; il a simplement pour vocation d’en dessiner les grandes tendances. Les statistiques seules ne sont en effet pas à même de rendre compte avec exactitude de la réalité des manifestations racistes, xénophobes et antisémites. D’autre part, il n’est pas particulièrement pris en compte le volet des discriminations raciales, notamment
dans l’emploi et le logement. Les discriminations relèvent en effet de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE), dont la CNCDH salue le travail mené depuis plusieurs années dans les domaines de la prévention des discriminations, de la promotion de l’égalité et de la condamnation des comportements discriminatoires.
Le présent volume s’articule autour de trois grands axes. Le premier consiste à proposer un état des lieux du racisme, de l’antisémitisme et de la xénophobie en France, à travers la présentation des chiffres et données recueillis par différents ministères, dans le cadre de leurs dispositifs statistiques, ainsi que des résultats d’un sondage d’opinion. Chaque chapitre de cette première partie est précédé d’une analyse de la CNCDH portant aussi bien sur la méthode de recueil des données que sur les résultats eux-mêmes. L’objectif est non seulement de faire état de la situation actuelle en matière de racisme, d’antisémitisme et de xénophobie,
mais aussi de constater des évolutions et des tendances dans les manifestations de
ces phénomènes. Les mesures de lutte et autres actions mises en oeuvre par le gouvernement
sont présentées et analysées dans la deuxième partie de ce volume, en
même temps que les actions initiées par la société civile, syndicats et organisations
non gouvernementales. Enfin, il est proposé au lecteur d’approfondir sa connaissance
du phénomène à travers une série d’études et notes figurant en troisième partie.
Ces contributions offrent à la fois un éclairage sur des sujets d’actualité – tels
que le suivi de la conférence de Durban II, ou encore les activités du CERD et de
l’ECRI –, et abordent des problématiques plus complexes, telles que le racisme
dans le monde du travail ou les manifestations du phénomène sur Internet. Le
volume se complète par la publication des résultats du sondage sur le racisme réalisé
en novembre 2009.
Enfin, la CNCDH souhaite saluer la mémoire de Madame Elisabeth Cohen-
Tannoudji, chercheuse au CRIF, qui a accompagné pendant plusieurs années
l’équipe chargée de l’élaboration du rapport.


Dérive incontrôlée à l'ULB.





L'Union des Etudiants Juifs de Belgique (UEJB) et l'European Union of Jewish Students (EUJS) réprouvent la décision des autorités académiques de l'Université Libre de Bruxelles d'offrir l'amphithéâtre Paul-Emile Janson à Dieudonné M'Bala M'Bala par un subterfuge, la diffusion du film « Est-il permis de débattre avec Dieudonné ?» de son porte-parole et « journaliste indépendant » Olivier Mukuna, dans lequel l'« humoriste » tient en fait une conférence longue d'une heure et demi.


L'UEJB et l'EUJS dénoncent la tribune et la caution de choix ainsi concédées par le Cercle du Libre Examen de l'ULB (Librex), organisateur de la conférence du 20 septembre 2010 sur la liberté d'expression, à un homme condamné à trois reprises en France pour délit d'antisémitisme.


L'UEJB rappelle que toute forme de racisme ou d'antisémitisme ne relève pas de la liberté d'expression ou de la liberté d'opinion, mais de délits punissables par la loi.

Comme en témoigne l'Histoire du peuple Juif, Arménien, Tutsi et Darfouri: les mots préparent le génocide, les mots tuent.

PS: Les deux extraits de Dieudonné ne figuraient évidemment pas dans le film d'Olivier Mukuna.

Du même auteur : Heureux comme un Juif en Belgique.

Vous êtes un Juif moyen, de nationalité belge. C'est la rentrée des classes. Vous vous réveillez le matin et vous allumez la radio. En vous rasant, vous entendez qu'un homme politique belge, commissaire européen, ancien ministre des affaires étrangères, pense qu'il est impossible de parler du conflit israélo-arabe avec un « Juif moyen », donc avec vous. Parce que vous êtes irrationnel et que vous croyez dur comme fer que vous avez toujours raison. Vous êtes humilié par la généralisation raciste ainsi faite par un haut représentant politique de votre pays. Et vous pensez immédiatement : ce n'est pas vrai, j'ai toujours défendu la solution « deux peuples pour deux Etats », je n'ai jamais nié la responsabilité israélienne, je pense simplement que la paix se fait à deux, et que les responsabilités sont partagées dans la poursuite du conflit. Est-ce tellement irrationnel ? Déjà huit heures, vous filez déposer vos enfants à l'école. Vous allez peu à la synagogue, mais vous avez choisi une école juive, pour qu'ils puissent apprendre l'hébreu, maintenir leurs traditions et connaître les spécificités de leur histoire. Or les écoles juives sont entourées d'épais pieux de béton pour se protéger des attentats, et doivent être surveillées en permanence par des gardiens privés, souvent accompagnés de policiers portant gilets pare-balle et mitraillettes. Vous traversez avec vos enfants le sas d'entrée surveillé par des caméras, et vous vous dites : décidément, nous les Juifs sommes un peu paranos. Puis vous vous souvenez de quelques attentats meurtriers ayant ciblé des lieux identifiés comme juifs. Pas israéliens, simplement juifs. En Belgique : grenades lancées sur un groupe d'enfants juifs montant dans un autocar à Anvers (1980, un mort), voiture piégée contre une synagogue à Anvers (1981, deux morts), et mitraillage d'une synagogue à Bruxelles (1982, 4 blessés dont deux graves). Et à l'étranger, plus récemment : la synagogue de Djerba (2002, 21 morts), la synagogue d'Istanbul (2003, 29 morts), les attentats de Casablanca notamment contre des cibles juives (2003, 45 morts en tout), les attentats de Bombay notamment contre un centre culturel juif (2008, 173 morts en tout). Cette répétition est-elle le fruit du hasard ? Vous vous rappelez alors que Ben Laden appelle à la guerre sainte contre les « Juifs » et les croisés. Pas les Israéliens, les Juifs. Vous vous souvenez qu'une association bruxelloise très active a appelé les musulmans, sur son site internet, à « se munir de destriers de guerre. Et par la suite, le peuple juif périra ». Pas le peuple israélien, le peuple juif. Vous vous rassurez en vous disant que ces musulmans-là sont très minoritaires. Mais en votre for intérieur, vous vous dites : pourvu que ces musulmans minoritaires continuent à choisir d'autres synagogues que celle où je vais, et d'autres écoles juives que celle de mes enfants. Et vous avez honte de votre réflexe égoïste mais tellement humain. A midi, vous déjeunez avec un collègue dans une taverne du centre-ville. On ne sait pourquoi, un quidam vous accoste et vous demande ce que vous pensez de la politique israélienne, « bien sûr, vous les Juifs avez souffert pendant la guerre, mais tout de même, est-ce une raison de faire la même chose aux Palestiniens ». Pourquoi vous ? Avez-vous l'air tellement juif ? Tellement différent ? Et puis, en quoi êtes-vous responsables de ce que fait le gouvernement israélien ? N'êtes-vous pas un Belge comme les autres ? Pour vous débarrasser de l'importun, vous répondez non sans un certain embarras qu'il a certainement raison, mais que maintenant, s'il-vous-plaît, vous voudriez bien terminer de déjeuner. Le soir venu, vous ne pouvez vous empêcher de penser à ce que vous a dit cet inconnu : les Juifs feraient aux Palestiniens ce qu'ils ont eux-mêmes subi pendant la guerre. Vous voyez sur internet les images d'une grande manifestation, dont le mot d'ordre fut « Gaza = Auschwitz », réunissant des dizaines de milliers de personnes en présence de plusieurs présidents de partis politiques francophones. Et vous vous dites : ainsi le peuple juif, mon peuple, dont le seul Etat au monde est Israël, serait devenu par un effrayant retournement de l'histoire une nation de nazis exterminant les Palestiniens ? Et si c'était vrai, ne faudrait-il pas alors éradiquer cet Etat, cette nation, traquer ces nouveaux nazis pour les empêcher de nuire ? Peut-on conclure un accord de paix avec des nazis ? Ou faut-il les combattre jusqu'à ce qu'ils capitulent ? Bien sûr vous savez, vous, qu'Israël n'a strictement rien à voir avec le nazisme. Tout le monde sait cela. Mais qui le dit ? Ceux qui font cette comparaison ignorent-ils qu'en associant Israël au mal absolu, ils encouragent un climat d'hostilité contre vous, le Juif moyen qui ne se désolidarise pas tout à fait d'Israël et qui est donc complice des nouveaux nazis ? Le lendemain, vous ouvrez votre quotidien favori, curieux de lire la polémique qu'assurément, les déclarations de votre ancien ministre auront suscitée. Et vous y lisez qu'en affirmant qu'il est impossible de parler avec vous, l'éminent diplomate aurait « bravé les tabous » et « dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas » (Le Soir, 4 septembre 2010). Vous pouviez imaginer qu'un individu dérape, fût-il un homme politique de premier plan. Mais si c'est là ce que tout le monde pense tout bas, avez-vous encore une place dans la société ? Vous poursuivez votre lecture et apprenez qu'à l'Université Libre de Bruxelles, temple de la pensée libre, on peut diffuser un film à la gloire du comédien Dieudonné M'bala M'bala, qui fut comique autrefois mais est aujourd'hui tellement obsédé par les Juifs qu'il les qualifie de « chiens ». Pas les Israéliens, pas les sionistes, les Juifs. Il a été condamné à plusieurs reprises par les tribunaux français pour incitation à la haine antisémite, mais certains de ses amis, invités dans l'enceinte de la pensée libre, défendent les qualités pédagogiques de l'histrion, tout en regrettant au passage que la loi sur le négationnisme leur interdise d'exprimer leur opinion sur les chambres à gaz. Le tout suscitant, dans les pages de votre quotidien habituel, une sorte de débat « pour ou contre » (Le Soir, 23 septembre 2010). Incrédule, vous lisez de doctes dissertations, et pour un peu, vous ne seriez même plus surpris si votre journal titrait : « le Juif moyen est-il ou non un chien ? ». Pris de vertige, vous vous demandez si ce pays, la Belgique, est encore le vôtre. Vous vous efforcez de chasser ce doute, de vous convaincre que la Belgique que vous aimez est une démocratie vigoureuse respectant la liberté de culte, un Etat de droit doté d'un système judiciaire indépendant et de législations contre le racisme et le négationnisme, et qu'il y a toutes les raisons pour que les Juifs y soient aussi heureux qu'ailleurs, voire davantage. Mais en vous-même, une petite voix ne cesse de vous répéter, obsédante, insidieuse : pourrai-je un jour vivre comme tout le monde ?